jeudi 2 avril 2009

G-20

Les grands commis responsables du volet politique du capitalisme mondialisé ont fait leur travail : le Capital se débat et il choisit la voie de la réforme. Pour survivre.

D'abord il faut dire qu'une réunion du groupe de nations dit du G-20 est déjà en soi une bonne nouvelle. Longtemps on n'a eu droit qu'au G-7, en questionnant même la légitimité de la participation du Canada, la plus petite des économies les plus avancées au monde, souvent perçu comme simple appendice des États-Unis.

Puis quand la Russie, amputée de son empire, se relevait de la crise et du chaos économique dans lequel elle était tombée suite à la chute de l'URSS en 1989 et la curée déprédative de la nouvelle oligarchie et quelques mafia, prétendait rejoindre à nouveau le rang des grandes puissances, nous avons eu le G-8.

Le G-20, donc, intègre tout un paquet d'autres pays pas seulement européens (l'Espagne s'ajoute) ou occidentalisés, comme le Japon, dont les principales économies émergentes aux vastes marchés, dont bien sûr la Chine, l'Inde et le Brésil et qui ensemble pèsent très lourd dans les parts prises au produit mondial total.

Que tous ces gens puissent discuter et faire valoir leur intérêts, au total fortement divergents, est un garant pour une meilleure chance d'atteindre à une sorte d'équilibre ou de justice dans l'organisation des échanges internationaux, prélude, faut-il l'espérer, à un partage plus équitable des richesses et autres avantages.

Puis quand il faudra discuter plus avant, dans l'urgence de cette crise encore plus fondamentale que la crise économique, et c'est bien la crise écologique résultant des menaces accumulées au-dessus de nos tête par le changement climatique en cours, il faudra qu'une meilleure compréhension de la situation particulière de chacun des participants à ce forum des nations précède la négociation de la contribution qui sera attendue, voir exigée de chacun.

Il semblerait que le résultat des négociations marque une sorte de compromis, match nul entre les deux leaders d'opinion que sont la France et les USA qui avaient des priorités divergentes. Il y aura réglementation accrue des marchés et chasse aux abris fiscaux comme le voulait la France, et du bout des lèvres les autres États se sont engagés à intervenir et dépenser plus dans les mesures prétendument efficaces pour sortir les économies de la crise mondiale.

Maintenant il faut admettre que cette crise a été déclenchée par les excès prolongés de l'économie américaine au développement malsain, exagérée par l'absence de réglementation favorisant à outrance les fonds spéculatifs, pimentée encore par les outrances de la politique internationale de l'ère Bush II. Il est légitime que dans la foulée de cette suite ininterrompue de graves erreurs, les États-Unis perdent beaucoup de leur influence et ne peuvent plus se poser en "leaders du monde libre" comme jadis, en l'ère Kennedy, mettons, ou encore naguère en l'ère Clinton.

Ce n'est que le talent et le charisme du président Obama qui peut encore un moment cacher ce fait : l'empire américain est ébranlé sur ses bases puisque c'est le rôle exagéré du dollar comme monnaie de change internationale qui est fortement remis en question, d'abord par la Chine, principal créancier de la dette américaine, puis par tous les autres qui en ont soupé du "problem" que représente "our currency" (cf. plus bas, la déclaration de Paul Volker).

Puis les mesures pratiquement aveugles de gonflement du crédit sont critiquables si elles n'équivalent qu'à donner les consommations gratuites à des alcooliques en espérant qu'ils cesseront de boire leur éthylisme jusqu'à la lie. Il faut bien admettre, comme le dit Jacques Attali sur son blog, que tout ce que l'on a trouvé jusqu'à maintenant c'est "qu’on emploie pour résoudre la crise les mêmes armes que celles qui l’ont créée." Et encore : "Tout se passe comme si les alcooliques anonymes, tout heureux de leurs bonnes résolutions, avaient décidé, au sortir de leur réunion, de prendre un dernier verre. Pour la route." Et vlan dans les dents!

Mais dans les dents de qui ? Par les mesures étatiques de relance c'est le public en fait qui se tire dans les pieds en gonflant démesurément la dette publique, qui est reportée aux générations futures qui auront déjà bien des problèmes sur les bras avec ce que nous leur laissons comme gâchis à réparer. Tout cela sans aucune réflexion en profondeur sur les tenants et aboutissants de la crise, tout cela sans aucun plan crédible de réforme du système.

Si l'on ne change pas la manière de prêter de l'argent et pour quoi faire, il se passe exactement le pire, c'est-à-dire "more of the same thing", c'est-à-dire que les banquiers et groupes financiers vont se servir de ces nouveaux leviers pour recommencer et continuer à spéculer dans l'idée du gambler qui est celle de "se refaire". Ainsi que pour continuer à se payer des primes énormes et bonus de congratulation des dinosaures qui n'ont encore rien compris et qui provoquent la colère légitime, malheureusement impuissante, on dirait, des citoyens dits ordinaires, par l'importance de leur fortune personnelle sans doute.

Dans ce contexte d'un bordel légué par le vacillant leadership américain, l'Europe se retrouve, à une nouvelle croisée des chemins en face de son destin, qui est d'assumer sa nouvelle position d'importance dans le système des rapports de forces stratégiques. La maturité implique d'assumer son indépendance et de définir sa propre politique. La France a pris acte de ce fait en se réimpliquant, paradoxalement en apparence, plus directement dans l'OTAN.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Lecteur, je suis personnellement intéressé à connaître tes impressions et commentaires à mes messages, pensées, suggestions, informations et interprétations.
La puissance des efforts de communication est amplifiée par la mutualité dialogique, ombre réelle de la réciprocité humaine entre interlocuteurs.