vendredi 29 mai 2009

Débat à Toronto sur les défis du XXIe siècle entre les deux plus récents ex-présidents

George Bush sort du placard. Il ne pouvait y rester éternellement, ça fait mauvais genre. Pour maintenir des apparences de légitimité au courant d'idées qu'il incarnait jusqu'à la caricature, suivant les pressions de son parti et de l'opposition à Obama qui tente de s'organiser, en partie sous la houlette de son âme damnée, son éminence grise, le naguère si puissant Dick Cheney, son ex-vice-président, G. W. Bush se prête à l'exercice du débat contradictoire avec l'autre ex-président Bill Clinton.

C'est logique, disons : il faut qu'il assume sa "pensée", ou au moins son attitude et fasse face aux résultats de ses décisions lorsqu'il était en poste, "in office". C'est, malgré l'étonnante position, la partie la plus difficile : expliquer les "résultats".

Finalement, après coup, on peut dire qu'il n'est pas sorti grand-chose de ce débat. Organisé et largement influencé par le conservatisme en place financière et au pouvoir au Canada, le tout était planifié pour faire la part belle à Bush, le modérateur Frank McKenna prenant bien soin de ne jamais l'acculer à défendre son bilan dans ses aspects litigieux, et pourtant ils sont nombreux et incontournables !

Il lui a été possible de continuer à propager ses contrevérités et même Bill Clinton n'a jamais cherché à le sommer de s'expliquer, comme si la chorégraphie avait été établie à l'avance. Ce qui laisse penser que la différence d'orientation politique entre les deux anciens présidents est beaucoup moins importante qu'on pourrait le penser, s'agissant de présidents provenant des deux partis traditionnels : moins importante, par exemple, que celle se creusant, au fil des jours et des discours et des décisions, entre ceux deux-là (qui se sont de fait entendus comme des larrons en foire...) et la présidence du révolutionnaire Obama !

Par contraste, on a l'impression que le président Obama développe un style tout différent alors qu'il ne fait que réagir aux multiples dimensions de cette crise et tente de colmater les brèches au fur et à mesure où elles se présentent, tenant le radeau de la nation à flot. Il s'adapte du mieux qu'il peut, c'est-à-dire avec la souplesse de sa grande intelligence, à ce temps difficile de transition entre deux systèmes : un qui a fait la preuve de sa grande nocivité et un autre, qui n'est pas encore trouvé pour résoudre les problèmes.

mardi 26 mai 2009

Un fantôme encombrant

L'ex-vice-président Dick Cheney s'agite encore ces jours-ci et tente de défendre son bilan activement : il ne connaît que la fuite en avant. C'est pourquoi il doit, en leader, tenter d'organiser l'opposition aux projets et politiques proposées, quand elles ne peuvent pas être imposées, par l'administration mise en place par le président Barack Obama. Il s'en est pris, jeudi le 21 mai, à la mollesse de l'administration Obama dans la guerre au terrorisme.

Il se devait, en particulier, de répondre au dernier discours de Barack Obama sous forme d'adresse à la nation à heure de grande écoute sur les principaux réseaux où celui-ci avait clairement mis en cause les méthodes de torture utilisées à Guantanamo en disant qu'elles étaient contraires aux valeurs américaines et contre-productives à la longue, aliénant des alliés actuels ou potentiels.

C'est ainsi que son influence a eu un effet sur le vote au Congrès qui mettait des bâtons dans les roues du projet de Obama de fermer la prison de Guantanamo en refusant d'accorder les fonds.

Je ne crois pas cependant qu'il fasse l'unanimité au sein même de son parti républicain, son nom est moins bon depuis qu'il n'a plus le contrôle de l'appareil d'État, truffé de polices secrètes et plus ou moins clandestines, illégitimes ; moins recommandables aussi depuis qu'il n'a plus les moyens de distribuer de larges récompenses aux nantis et investisseurs dans le complexe militaro-industriel.

Surtout, ce nom résonne moins bien aux oreilles des américains qui doivent subir les catastrophes personnelles et collectives qui résultent de la crise financière, économique, écologique, sociale et politique qui a été fortement aggravée par la stratégie qu'il a lui-même mise en œuvre.

"Soyons clairs : Cheney parle pour les sections puissantes de la classe dirigeante, soutenue par des sections substantielles de l’appareil militaire et des services du renseignement, qui sont profondément hostiles à la démocratie", nous dit Joe Kishore dans un article datant du 22 mai (version originale anglaise) publié dans le World Socialist Web Site (wsws.org). Je suis entièrement d'accord avec cette évaluation de la position Cheney et sur le zèle de la police politique clandestine à défendre la constitution démocratique.

Alors, pour l'ensemble de son œuvre, il serait temps, je crois que l'évaluation par l'opinion de fasse sentir : il est improbable que jamais dans l'histoire sa stratégie politique obtienne un jugement favorable, jamais la note de passage. Il a précipité le déclin de l'empire américain, compromis le prestige des États-Unis et le leadership américain dans le monde que s'emploie à restaurer le président actuel. Celui-ci, Barack Obama, a dû prendre le contre-pied de cette "stratégie" et sur pratiquement tous les sujets importants effectuer un virage à 180 degrés.

Dans son discours le même jour, comme en réplique, le président Obama est demeuré ferme sur ses positions et dans la condamnation des agissements de la précédente administration, refusant cependant d'aller plus loin que de parler d'"erreurs"...

Dans la récente controverse, cependant, Cheney se faisait cinglant, ouvertement méprisant à l'égard des choix et de l'attitude de Obama et allait jusqu'aux menaces à peine voilées lorsqu'il faisait état du mécontentement du personnel de la CIA et autres agences plus ou moins clandestines. Ces gens-là n'aiment pas, en effet, que l'on remette en cause leurs méthodes de travail et se méfient comme la peste de toute velléité de contrôle politique, surtout droit de regard démocratique, sur leurs agissements, comme s'ils étaient au-dessus des lois, puisque pour défendre, disent-ils, la Constitution des États-Unis, ils doivent exiger l'impunité alors qu'ils l'enfreignent régulièrement.

Mais il est vrai qu'Obama doit être prudent car il s'avance sur un terrain miné. Il ne peut s'assurer d'un appui solide, c'est-à-dire constant, indéfectible et quasi-unanime de la part des services secrets et même de l'appareil militaire, lorsque ses choix politiques semblent léser directement leurs intérêts symboliques et matériels. N'oubliez pas que l'on n'a toujours pas complètement éclairci le complot qui menait à l'assassinat de Kennedy et que tous les coupables n'ont pas été identifiés. Beaucoup de groupes puissamment organisés lui en voulaient dont la CIA après le débarquement manqué à la Baie de Cochons, Cuba.

mercredi 20 mai 2009

Accord sur les changements climatiques

Voici la source de ma déprime familière : la révélation que nous courons au cataclysme. L'ennui c'est que nous ne le voyons pas venir parce que les conséquences ne se laisseront pas aussitôt sentir. Nous passons le problèmes, la maladie et tous les risques à nos descendants. Je dois aller lire ce livre de Jean-Marc Jancovici écrit en collaboration avec Alain Grandjean C'est maintenant! Trois ans pour sauver la planète, qui est sorti récemment aux éditions du Seuil...

Urgence d'agir. Il semblerait que des discussions secrètes ont lieu en Chine dès avant l'arrivée officielle d'Obama en place du pouvoir. Il y aurait déjà eu dans ses grandes lignes un accord de conclu entre les plus grands pollueurs de la Terre. Et nous, les habitants ordinaires de cette Terre, le public quoi, en serions informés cet automne, selon The Guardian du 18 mai 2009.

J'ai hâte de voir tout cela se confirmer, mais je serais très déçu si cet accord ne comporte pas des mesures allant bien au-delà des chétives et timides mesures annoncées dans le plan Obama pour l'amélioration de l'environnement. Ce plan affiche, entre autres choses, une décision de réduire de seulement 10% les émissions de carbone des États-Unis par rapport à 2005. Je vois que le plan annoncé par The Guardian va plus loin.

Il y aurait une déclaration d'intention commune en trois points :

- Utiliser les technologies existantes pour couper de 20% les émissions de carbone en 2010 (!)

- Coopérer sur la recherche de nouvelles technologies dont le stockage de carbone et sur l'efficacité des carburants pour les voitures.

- Les États-Unis et la Chine signeront un accord global sur les changements climatiques à Copenhague, lors du sommet prévu au mois de décembre prochain.

Ce qui est une bonne nouvelle pour tout le monde : nous avions les deux principaux pollueurs de la planète qui étaient accusés de ne rien faire et tout à coup ils se retournent et acceptent de prendre leurs responsabilités ! Encore un peu et la dynamique nouvelle qui se mettrait en place aurait pour effet, non négligeable en ce qui me concerne, même si c'est un effet très secondaire, de me sortir de ma déprime !

lundi 11 mai 2009

une reprise fallacieuse

Il semble que la compréhension des problèmes économiques ne soit pas le point fort de l'équipe présidentielle Obama. Celui-ci s'est entouré de conseillers de premier plan dans la théorie économique encore actuellement dominante mais qui est précisément mise en faillite intellectuelle par la crise présente dont la profondeur ébranle les fondements du système capitaliste, que l'on accepte ou non de le reconnaître. C'est alors que nous avons droit, par ce faramineux plan dit de relance, mais qui est en fait le sauvetage par des fonds publics, gagés sur un avenir incertain de générations éprouvées ou chétives, d'intérêts privés et prédateurs, à toujours et encore "more of the same thing"... ad nauseam.

Les pertes dans le secteurs financiers sont abyssales, c'est pourquoi il n'est pas certain que même l'impression gigantesque ("quantitative ease") de nouvelle monnaie pour gonfler la masse monétaire conduise, à court terme en tout cas, à une hyperinflation qu'attendent plusieurs économistes : tout simplement parce que toute cette masse de nouvelle monnaie tombe littéralement dans le trou creusé par les pertes et ne se retrouve pas vraiment en circulation, sous la forme de nouveaux prêts par exemple, ce qui serait nécessaire pour relancer d'abord l'investissement et ensuite la consommation intérieure.

C'est pourquoi aussi cette crise va être longue, plus longue que ne le croient la plupart des "spécialistes", et que la reprise sera lente, laborieuse et devra emprunter des chemins inédits. Car la chance qui reste est que l'administration obamienne manifeste assez de dynamisme et de créativité dans ladite nouvelle économie sociale et puisse créer assez d'emploi, entre autre par de vastes chantiers qui seront très utiles pour améliorer la situation sur le front de l'environnement, de la lutte à la pauvreté et la répartition plus généreuse des soins de santé, avec l'accent mis sur la prévention des problèmes liés au mode de vie qui provoquent l'explosion des coûts. C'est le volet social qui a meilleure chance de nous sortir de la crise et non le volet strictement financier, monde abstrait mais vampire et prédateur des énergies vivantes dans la population, et qui ne voit pas de raison de changer sa manière, qui est de se gorger du sang de ses victimes.

Mais Obama ne pourra pas nationaliser les banques par simple décret. Pédagogue, il va devoir montrer progressivement que par la force des choses, et la démonstration de son irresponsabilité, les services financiers devront être mis au pas et réduits, dans leur prétentions, à de plus justes proportions et qui est, finalement, de servir, en effet, le public.

vendredi 1 mai 2009

Obama éducateur

L'impression que je garde après avoir vu le discours hier soir, retransmis à la télé (par CBC en direct) est d'abord que le "show" est bien monté. Les questions préparées d'avance, soumises à l'approbation et choisie par Obama et son équipe. Personne n'est dupe dans la salle : le président Obama s'adresse d'abord aux téléspectateurs et à travers eux, il espère, à l'ensemble de ses supporters, surtout, pour les mobiliser, et aussi à ses détracteurs dans l'espoir de quelque peu les amadouer.

Alors, non seulement nous avons le discours d'un politicien brillant, probablement le meilleur orateur que j'aie jamais vu (dans ma longue vie), mais nous avons la démonstration d'un grand éducateur, qui veut prêcher par l'exemple, qui se montre cohérent avec ses précédents engagements et conséquent avec les principes qu'il s'est fixé depuis les débuts de son implication dans l'organisation des banlieues pauvres.

Ce gars-là ne s'abaisse pas à mentir. On le sent, cela se voit et cela s'entend ! Quelle différence déjà avec tous ces politiciens dont les plus récents sur la scène états-unienne n'ont été que les pires ! Mais cet homme veut que l'on comprenne sa démarche, que l'on mesure bien les difficultés de sa tâche, pas pour le plaindre ou en tirer une sorte d'avantage. Non, parce qu'il a besoin de la patience et de la collaboration --de plus en plus active d'ailleurs-- de ceux qui souffrent le plus de la situation actuelle. Il leur fait comprendre que sans leur soutien il ne sera pas en mesure d'imposer les solutions qu'il préconise aux différents problèmes qui se pressent à l'agenda.

Il fait le pari de la transparence et de la générosité des valeurs humanistes qu'il préconise comme faisant le vrai fond de l'Amérique : l'idéal Américain qui alimente, aussi, finalement, le rêve américain qui avait pris tellement de plomb dans l'aile depuis les trente dernières années.

Je prends l'exemple de la question sur la torture. Oui, il a signé une directive interdisant de poursuivre toute forme de torture dans les interrogatoires, même si cela ne devait pas permettre d'obtenir certaines informations importantes qui auraient pu même sauver des vies --c'est toujours l'argument extrême qu'invoquent les extrémistes-- parce que, dit-il, cela serait s'abaisser et s'avilir que d'utiliser les mêmes tactiques et de recourir aux mêmes abus que nous dénonçons chez les dictateurs et ennemis du monde libre.

Au-delà du calcul immédiatement utilitariste, il considère qu'à long terme c'est plus rentable de maintenir un haut standard moral, que cela va finir par attirer plus se sympathies que de simplement se comporter en belligérant prêt à recourir à tous les moyens pour vaincre. Cela n'est pas ainsi qu'il voit la puissance de l'Amérique. C'est courageux mais certains diront naïf.

Mais c'est philosophiquement vrai et il me semble que cela témoigne d'une pensée plus haute, d'une stratégie plus englobante et qui devrait gagner, aussi, par la force de l'exemple à imposer ces valeurs, à moins que l'horrible destin de la terre soit de voir la victoire des forces des ténèbres. Voilà ce que je n'hésite pas à nommer les nouvelles lumières que nous propose le président Obama.